mardi 31 mars 2015

ACTUALITES



Depuis plusieurs jours, Bobo-Dioulasso est « assiégée ». 

Pas de bière, pas d’eau (pas dans le secteur 9 où je réside heureusement), de nombreuses coupures d’électricité, des routes barrées, celle qui mène à Ouagadougou notamment…

Tout a commencé avec une nouvelle grève des employés de « Brakina », vous vous souvenez la bière nationale. Là déjà, ça touche au cœur des burkinabés. Les nombreux débits de boissons ne sont plus alimentés, les maquis n’ont plus de quoi étancher la soif des noctambules. Tout le monde court, a ses combines, son réseau et ses relations, mais au bout d’une semaine, force est de constater qu’il n’y a plus de Brakina nulle part…

On se rabat sur la « Flag » moins appréciée, puis sur une bière française (Castel) puis sur la Guiness au pire sur le coca.

Depuis deux jours, des quartiers entiers sont privés d’eau. Les maquis qui préparent à manger sont mis encore plus sous pression. Tout semble fait pour soulever la population, provoquer la colère. Si vous ajoutez le délestage comme ils appellent cela ici (l’électricité manquant, les responsables coupent dans les quartiers et font tourner) et les barrages sur les routes, on dirait une ville assiégée.
 
Ce matin par exemple, c’est nous qui manquons d’électricité. Le patron de l’auberge me dit qu’à cette époque de l’année, les coupures d’eau ne sont pas rares et vous avez compris que le « délestage » est structurel. En fait, les syndicats profitent de cette période instable pour se mettre en grève un peu partout et bloquer la ville. On me dit que c’est pareil à Ouaga.

Les syndicats seraient manipulés par l’opposition (au parti de l’ex-Président Blaise Compaoré) pour qu’elle ait une chance de pouvoir passer aux prochaines élections prévues en octobre. Ce serait également une manière de contester le pouvoir militaire actuellement en place qui, ne se sachant pas éligible, attend que ça passe en s’en mettant plein les poches (dixit la plupart des burkinabés).

En fait, ils ne gouvernent pas. Toutes les affaires sont en suspens, les projets, les subventions, tout le monde attend. Ils ne dirigent plus vraiment les fonctionnaires livrés à eux-mêmes avec toutes les dérives que cela peut supposer. La police par exemple est absente complètement de l’espace public, sauf s’ils ont besoin d’argent et là, me dit-on, ils arrêtent à l’aveugle pour mettre des amendes.
Les accidents auraient terriblement augmenté puisque rien n’est plus régulé dans la circulation.

Bon, il va être temps d’aller me mettre à l’abri au village. Vivement que ce foutu virement international arrive, pour l’instant je suis coincée là à l’attendre !! Comme dirait mon beau-frère Philou, c’est le meilleur moyen pour faire des économies…

dimanche 29 mars 2015

Article du Faso.net : Conflit social à la BRAKINA



Conflit social à la BRAKINA/SODIBO : La direction générale fait des mises au point 

dimanche 29 mars 2015

Brakina Beer / Burkina Faso (Wander Gal) Tags: beer brakina burkinafasoouagadougouafricawesafricatravelgonetravlinindependenttravelthirdworldtravelwomantravelcultureartfoodwandergalboabtreeziniarebazoule

La boisson ne coule plus à la BRAKINA-SODIBO (Brasserie du Burkina Faso / Société de Distribution de Boissons). Depuis le mardi 24 mars dernier, des employés ont bloqué la production à Ouaga et à Bobo. Tous les bureaux et usines sont occupés. Ils exigent une augmentation salariale de 100% ainsi que la satisfaction d’autres points de leur plateforme qui avait déjà fait l’objet d’une grève en début d’année. Le directeur général a rencontré la presse dans la soirée du 27 mars pour faire le point de la situation qui prévaut dans son entreprise. Il appelle à la responsabilité des grévistes, à la levée de la grève illimitée qui n’a fait l’objet d’aucun préavis, avant l’éventualité d’un quelconque dialogue.
En rappelle, dans la plateforme revendicative des agents qui a fait l’objet de mouvement en début d’année, il y avait 4 points. La revalorisation des salaires à hauteur de 100%, le règlement des conflits sociaux de 1994 et de 2004, la reprise du chantier des accords d’établissement et les conditions générales de travail au sein de la BRAKINA-SODIBO.
Selon le directeur général de la société, cette plateforme a fait l’objet d’une rencontre à la direction générale du travail. Une partie des points litigieux aurait fait l’objet de conciliation totale, l’autre partie a été consignée dans un procès-verbal (PV) de non-conciliation, et remis à un conseil d’arbitrage pour l’évolution. « Nos partenaires n’ont pas attendu la mise en place du conseil d’arbitrage actuellement en cour d’élaboration au niveau de la direction générale du travail ».
« Nous avons eu une conciliation sur la reprise des travaux relatifs aux accords d’établissement. Nous avons même tenu une rencontre le 11 février avec les partenaires sociaux sur ce point pour voir les modalités de fonctionnement des commissions. Nous avons déjà fini et sommes prêts à remettre la première mouture de nos propositions à la direction générale du travail et aux syndicats pour avis et négociation. Le 2e point sur lequel nous sommes tombés d’accord et qui a fait l’objet d’un PV de conciliation, c’est le point relatif aux dossiers sociaux de 2004 ».
En mars 2014, la direction générale avait signé avec les représentants du personnel, des accords pour le relèvement salarial pour 2015, à hauteur de 6,5%. Entre temps, face à la crise de début 2015, et pour « montrer sa bonne volonté », la direction a octroyé un échelon complémentaire à l’ensemble du personnel, ce qui correspond à 6% d’augmentation. En 2015, toujours de l’avis de Marc Pozmentier, il y a eu au total 12,5% d’augmentation de salaire, mais les travailleurs auraient argué qu’ils ne discuteraient pas en dessus de 80% d’augmentation.

Une grève qui coûte très chère 

Ainsi donc, le mardi 24 mars dernier, les agents ont reconduit la grève qui, selon le directeur général Marc Pozmentier, n’a fait l’objet d’aucun préavis. Tous les bureaux sont interdis d’accès, les outils de production sont également inaccessibles à Bobo et à Ouagadougou. Une journée sans travail à la BRAKINA-SODIBO, ce sont des millions de perdu.
Ce sont entre 500 et 600 millions de FCFA de chiffre d’affaire perdu par jour. L’Etat également a déjà perdu entre 150 et 200 millions en quatre jours de grève, correspondant aux taxes et impôts, a argumenté le premier responsable de l’entreprise. Quand la brasserie éternue, c’est toute la chaine qui tousse. Des caves, aux débits de boisson, la grève se fait déjà sentir.

Le scénario catastrophe, pas encore envisagé

La direction générale envisagerait-elle des licenciements ? « Nous ne sortirons pas du cadre légal du droit du travail burkinabè. Nos partenaires sont grands, adultes, qu’ils prennent leur responsabilité. Les procédures de grèves sont claires. Nous ne remettons pas en question le droit de grève, mais il y a aussi le droit du travail. Le scénario catastrophe existe, mais pour le moment, il n’est pas envisagé », précise Marc Pozmentier.
Il a ainsi invité les frondeurs à lever le mot d’ordre grève illimité avant que tout dialogue ne soit envisagé. « On ne peut pas discuter le couteau sous la gorge ; notre premier préalable, c’est que les agents nous permettent de travailler » a ajouté le directeur. Mais au cas où la situation perdurerait, le conseil d’administration se réunira et décidera de la conduite à tenir.
L’entreprise dit faire des efforts pour ses employés
Foi, de Marc Pozmentier, les employés de son entreprise ne sont pas les moins lotis au Burkina. Bien au contraire. A l’entendre, le plus petit salaire, c’est-à-dire l’ouvrier qui vient de débuter sa carrière à la SODIBO-BRAKINA, perçoit un salaire brut de 88 180f CFA.
A cela, viennent s’ajouter 10% pour la prime de logement, la prime de boisson 28 692f, la prime de transport 13 100f. Le salaire le plus bas à la BRAKINA-SODIBO ferait environ 140000 f CFA. Un salaire perçu sur 14 mois et l’entreprise prendrait aussi sur lui, 100% des frais médicaux pour l’agent, son conjoint et cinq de ses enfants.
Tiga Cheick Sawadogo
Lefaso.net

mardi 24 mars 2015

MON GUIDE



Revenue à Bobo-Dioulasso depuis vendredi 20 dernier, j'ai surtout dormi beaucoup, me suis reposée après la formation.
Je dois vous parler de mon guide.



En partant pour cette troisième fois dans les  villages, j’étais un peu inquiète. Non par rapport au formateur Djakaria qui parle aussi bien le moré, que le dioula, que le bambara, mais pour les autres journées, la communication s’annonçait  difficile, voire impossible sans interprète.

Est apparu Moussa,  Moïse de son vrai nom, mon guide comme je l’appelle.
Je n’avais pas un souvenir précis de Moussa lors du premier voyage, mais lors du deuxième séjour en janvier 2014, je me souviens. J’avais eu l’impression forte de passer une épreuve. Il m’avait questionné longuement un soir avec le chef des griots sur mes intentions, mes motivations. Puis il m’avait demandé de découper un poulet. Le monde avait basculé, je ne savais plus tout à fait où j’étais, mais je me souviens qu’il avait arrêté de me questionner lorsque j’avais dit que j’agissais avec le cœur et avec la lumière.

Moussa depuis le premier jour, ne me lâche pas. Il anticipe, prévoit, protège. Il me prévient lorsque je dois commencer mon discours devant les apiculteurs à Pia (sinon on y serait peut-être encore). Il me passe ses chaussures lorsque les miennes lâchent dans la ballade à la source… Il m’apprend le dioula, m’explique les codes (ce qui se fait, ce qui se dit et surtout ce qui ne se fait pas ou ne se dit pas).

Son français est limité, mais il parle suffisamment bien, surtout sait s’adapter aux différentes situations et me faire percevoir les nuances. Il tente de comprendre, d’établir un véritable échange.

Une belle rencontre, une présence lumineuse qui me fait beaucoup de bien !.. Merci Moussa, merci.




lundi 23 mars 2015

LA PLUIE DES MANGUES....

Depuis plusieurs jours déjà, tout le monde parlait de "la pluie des mangues".
A cette période, alors que les mangues ont commencé à mûrir, les burkinabés attendent tous cette fameuse pluie, celle qui va laver les mangues de leur poussière.

Le vent...

Ca y est, elle est arrivée, aujourd'hui lundi. Comme chez nous, le temps était lourd et on entendait gronder au loin. D'un coup, le vent s'est levé très fort, la pluie s'est abattue sur le sol, ruisselant, s'étalant en immenses flaques dans les nombreux creux de la cour. Un bonheur de fraîcheur et d'humidité, envie de chanter : "La pluie fait des claquettes" de Nougaro. Je chante, mais je ne connais  plus très bien les paroles.







Ouahhhh, je vais peut-être bien dormir ce soir. 
Quel plaisir !
 Tout ruisselle, je vous laisse admirer.

Ruissellement
 

Rideau de pluie


Effet immédiat et profond de la pluie sur les hommes.... Ils dorment.
Ils ne sont pas trop d'accord pour que je mette la photo. Surtout l'un d'entre eux qui me confie qu'il est fonctionnaire et devrait être....  au travail. Que faire ?

Après la pluie....la cour


mardi 17 mars 2015

FORMATION : 3ème jour



L’organisation de cette 3ème journée consacrée à la pratique a été difficile à mettre en place.

Il s’agissait de permettre d’expérimenter à la fois les protections pour les apiculteurs chevronnés, et de découvrir les ruches traditionnelles avec les essaims pour les débutants, les débutantes devrais-je dire, car les hommes même s’ils ne sont pas apiculteurs de métier, ont tous un jour ou l’autre participé à récupérer des ruches dans les arbres. 

Nous avions organisé deux groupes de 8 personnes (le nombre de protections maximum en notre possession). Il s’agissait pour Djakaria de trouver deux ruches traditionnelles pas trop hautes à récolter et ce n’était pas gagné apparemment… Nous finissons par partir assez tard, trop tard pour les abeilles et nous, le soleil étant déjà haut et nous arrosant généreusement de ses rayons. 


Nous prenons le petit chemin de la source déjà vue dans un article plus haut. Trois femmes sont dans mon groupe, Mamoya, la femme de Tara l’apiculteur, je crois qu'elle s'appelle Maoma et une autre femme avec un petit enfant. Il y a aussi Moussa, Bakary d'Ira et un apiculteur professionnel.
Nous attendons patiemment que le premier groupe passe. Ils doivent descendre la ruche et récolter. 

Tout le monde expérimente les protections, mais aussi les enfumoirs et ce n’est pas simple : faire comprendre que le feu ne doit pas prendre, qu’il doit être étouffé, que la fumée doit rester épaisse, blanche et froide.
Le premier problème qui se pose est celui du combustible : chercher de l’herbe sèche, les résidus de petit mil peuvent fonctionner si on les broie vraiment. Par contre, s’ils sont juste brisés et tassés, il y a trop d’espace entre les débris et le feu a vite fait de prendre. Ne pas oublier de mettre des herbes vertes sur le dessus pour rafraîchir la fumée, des feuilles d’eucalyptus par exemple.


D’ailleurs, ça ne rate pas ! Un participant du premier groupe, pris de panique, pompe généreusement sur son enfumoir et ça prend feu. Le feu brûle évidemment les abeilles, mais aussi la combinaison de son voisin. Djakaria doit laisser ce qu’il fait pour éteindre, heureusement plus de peur que de mal. Mais les participants sont éprouvés, les abeilles agressives et même si personne ne se fait piquer, ils veulent tous redescendre au plus vite avec leur récolte. Or le deuxième groupe n’est pas passé. Palabre !!!



Nous sommes redescendus assez bas pour que les abeilles ne nous poursuivent plus et on sent nettement le flottement dans le groupe. Je ne comprends pas tout, mais les voix sont aigues, s’entrecroisent. Il y a un peu de panique. Djakaria attend, me dit qu’ils les laissent discuter. Et là, je m’interpose. Je demande la parole, et comme je n’arrive pas à me faire entendre, je frappe dans mes mains, je retrouve mes réflexes d’animatrice de formation. Je dis très clairement que tout le monde doit retrouver son calme, que les abeilles ont besoin de silence et de sérénité, que le deuxième groupe va monter, qu’il n’y a pas le choix. Donc je demande à ce que les échanges de vêtements de protection se fassent et ça se fait….


Notre groupe restera tranquille jusqu’au bout. Le travail se fait en douceur, malgré des enfumoirs encore trop chauds qui brûlent des gants. J’enrage de ne pas savoir parler dioula.
Les femmes s’approchent, Maoma retire elle-même les galettes de cire de la ruche. Au passage, Djakaria fait observer le couvain, le pollen, le miel operculé ou pas, les cellules de mâles. 

On ne peut que détruire cette ruche, c’est comme ça, au moins n’avons-nous pas brûlé les abeilles et surtout nous avons récolté en plein jour et ça c’est vraiment une découverte et une nouveauté pour les apiculteurs persuadés qu’ils ne peuvent y aller que de nuit.

          
Les cueuilleurs de miel

 














                                     


La prochaine fois, j’espère que nous pourrons récolter et observer sur nos ruches kenyanes.

Le retour est difficile pour moi, je suis épuisée par la chaleur, il a fallu remonter deux fois le long de la source, j’ai été un peu au-delà de mes limites. Je demande de l’aide pour m’aider à marcher dans les cailloux car je sens mes jambes très faibles. Sur le chemin, j’avance mécaniquement sous les rayons peu tendres de notre grand soleil. Lorsqu’au loin j’ai vu arriver Dramane sur sa moto, j’ai poussé un « ouf » de soulagement, je n’en pouvais plus.

Un dernier rassemblement dans la cour pour faire le point avec notre récolte. Des questions encore ! Puis les hommes m’adressent leurs remerciements pour ces journées qui se sont bien déroulées. Ils sont très satisfaits me disent-ils. 

Les femmes veulent prendre la parole à leur tour. Mais elles ne savent pas qui doit parler parmi elles, et elles ne sont pas sûres de ce qu’elles veulent dire (ou demander). Conciliabules, les hommes les pressent. Elles prennent le temps. Finalement, l’une d’elles (c’est peut-être la femme de Tara je ne sais plus) déclare que ce dont elles ont besoin aujourd’hui, c’est d’avoir une presse à karité. Je renvoie sur l’association des apiculteurs, mais je ne suis pas sûre que ce soit la bonne réponse. Je vais y réfléchir et je le leur dis.

lundi 16 mars 2015

FORMATION : 2ème jour



 Rendez-vous à 9 heures. C’est toujours un peu long à démarrer. Les gens arrivent par petits groupes, à pied, en bicyclette, en moto… On démarre.
Deuxième jour : Djakaria va parler des produits de la ruche entre autres.

Les femmes ce matin ont des revendications. Elles viennent se plaindre qu’elles n’entendent rien du tout, éloignées qu’elles sont du formateur et du tableau.

Cela tombe bien car j’avais moi-même décidé de demander l’avancée aux premiers rangs des six femmes inscrites officiellement dans la formation. Cris, récriminations, le ton monte…
J’appuie autant que je peux la demande étant donné que je ne peux pas suivre les arguments des uns et des autres. Finalement, l’assemblée sera divisée en deux : face aux formateur Djakaria, à gauche les femmes sur des nattes (il n’y a pas assez de bancs et apparemment cela leur convient) et à droite les hommes. On ne mélange pas les genres et tout le monde peut écouter.



Voilà qui fera trace, pas une avancée historique, mais une expérience vécue qui pourra être reproduite dans d’autres circonstances. Les femmes se positionnent, réclament et obtiennent d’être placées aux premiers rangs. Quand je vous disais qu’une formation, c’est beaucoup plus qu’un simple transfert de connaissances.




Ce matin, dégustation de miel. J’ai apporté dans mes bagages deux pots : un miel de mes propres abeilles qui sont allées en juin sur d’immenses champs d’armoise et un pot de miel de lavande des abeilles de Jean-Louis Lunel, miel bio exceptionnel. J’ai pris soin d’acheter avant de partir pour les villages un pot de miel des producteurs du Houet à Bobo-Dioulasso pour que les apiculteurs puissent apprécier les différences, voir les conditionnements.



Comme nous n’avons évidemment pas suffisamment de petites cuillères, décision est prise de mettre dans chaque main une petite quantité de miel. Evidemment, cela prend du temps. Une femme vient m’aider. Finalement, le goût du miel de lavande les surprend beaucoup, ils ont des difficultés à apprécier. A l’unanimité, ils déclarent mon miel le meilleur, mais je les soupçonne de partialité….