Après avoir rencontré le menuisier, nous repartons vers
Pia en moto avec Moussa. Il est déjà 18 h 30 environ. La nuit descend, les gros nuages noirs qui
s’accumulent au loin nous inquiètent… Nous devons rentrer avant que l’orage
n’éclate.
Les pluies tropicales
sont violentes, elles peuvent durer. L’eau ne pénètre pas dans le sol
facilement, elle s’écoule donc en grands torrents qui déferlent le long des
pistes, sur les pistes, partout…
Moussa est un très bon
conducteur. Là où Dramane passe en force car il est grand et costaud, Moussa
manie la moto avec précision et finesse. Je suis montée un jour avec un autre
villageois, je ne le ferai plus jamais, j’ai eu vraiment très peur, il allait
vite et rasait les nombreuses charrettes qui rentraient du marché… Avec Dramane ou Moussa, je suis en totale confiance.
A quelques kilomètres
de Saba, annonçant la pluie prochaine, le vent se lève et avec lui des
quantités inimaginables de sable. Le sable s’infiltre partout, dans les yeux,
les oreilles, la bouche. Je ferme les yeux malgré la protection de mes lunettes,
je ne comprends pas comment Moussa continue à avancer, au pas bien sûr. Il faut
atteindre Saba avant que ça ne déferle…
Soudain, je sens la moto se
coucher doucement sur le côté, prise dans un banc de sable. J’ai largement le
temps de me dégager avant qu’elle ne touche le sol. Un bon fou-rire et nous
repartons !
Moussa lutte
énergiquement contre les éléments, je me protège derrière son dos, priant pour
que nous arrivions quelque part et qu’il ne se perde pas. D’ailleurs il se
perd, lui-même n’en revient pas, cette piste qu’il connaît par cœur s’est
fondue en quelques secondes dans un immense nuage opaque, piquant, violent qui
nous bouscule et nous fait sentir tout petits, petits…
Enfin sans transition, le
vent cède la place à la pluie, fine d’abord, puis de plus en plus forte. Nous
sommes vites trempés, mais Moussa accélère maintenant que la vue est un peu plus dégagée. Ça
glisse déjà, mais il faut arriver.
La silhouette des
premières cases de Saba se profile. Moussa sûr de lui tourne à droite, entre
dans une cour proche… mais pas de lumière. Il n’y a personne !
Il nous faut repartir,
le chemin, la route à traverser, le chemin encore, long, puis la case, puis des
lumières. Il klaxonne. On sort rapidement pour nous aider, garer la moto à
l’abri, nous sécher. J’ai pris mon sac à dos, la valise hermétique peut rester
sur la moto.
Il y a dans cette
unique pièce, toute la famille, les hommes d’un côté, les femmes de l’autre.
Tout semble entassé dans un désordre pour nous inimaginable. Les bancs côtoient
les casseroles qui elles-mêmes touchent les chaussures… Nous nous installons au
centre près de la porte et après avoir bu, on nous propose de partager leur
repas, du tau de mil bien sûr avec une sauce « feuilles de
baobab ». C’est très bon, et je mange volontiers.
Parenthèse :
Le tau est en quelque sorte le plat national. Il peut être préparé à base de
farine de maïs ou de mil ou les deux mélangés. Personnellement je n’aime pas le
maïs, trop lourd et surtout sans véritable goût. Le mil est beaucoup plus riche
et léger. On fait cuire une sorte de bouillie à base de farine et d’eau que les
femmes remuent énergiquement (il faut beaucoup de force) pour que ça n’attache
et ne brûle pas. On y rajoute souvent de la potasse (je ne sais pas pourquoi).
Lorsque le tout est suffisamment épais et cuit, on le verse par couche dans un
saladier où le tau refroidit doucement. Il peut alors être servi avec une sauce
tomate, feuilles ou graines (palmier, sésame ou arachide) à laquelle on a
rajouté quand on peut quelques morceaux de viande ou du poisson séché.
On me propose de me
changer, je préfère attendre. J’ai besoin de me laver. Au bout d’une petite
demi-heure, la pluie se calme suffisamment pour que nous puissions repartir. Il
nous reste encore bien 5 ou 6 km de piste. Tout se passe bien et nous arrivons
sans problème à Pia.
Il pleuvra toute la
nuit, des trombes d’eau, à tel point que des fuites apparaissent entre les tôles
du toit de ma chambre, heureusement le long des murs de soutien, mais ça coule
doucement dans ma direction. Je replie ma natte et surveille du coin de l’œil.
Les villageois se rendent aux champs |
Le lendemain matin, de
très bonne heure, tout le monde est prêt à partir aux champs ! Cette fois,
ça y est, la saison des pluies a vraiment commencé, l’eau est là. Les
villageois vont pouvoir enfin labourer leurs champs et préparer la terre pour
les semences de mil, de fonio, de sorgho… Sur tous les visages, de grands
sourires immenses, le travail les attend, mais aussi la promesse des récoltes
pour l’année à venir… Il est temps !
Au loin à gauche une parcelle labourée |
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