Au téléphone, je n’avais pas été capable de comprendre réellement la situation. Dramane, le président de « Djigui Sémè » l’association locale d’apiculteurs, ne parle pratiquement pas le français et l’accent de Moussa doublé d’un réseau trop souvent défectueux ne m’avaient pas permis d’entendre les raisons de cet abandon.
J’avais juste compris
que les menuisiers de Pia ne pouvaient pas faire les ruches. Or, toutes les
planches avaient été amenées à Pia (18 km de pistes sablonneuses). Elles
avaient voyagé de Djibasso à Pia en charrettes tirées par des ânes, 4 planches
par charrette, au moins 6 charrettes mobilisées.
J’avais compris également
que Dramane et Moussa s’étaient mobilisés pour trouver un nouveau menuisier à
Djibasso, et l’avaient trouvé. Il avait apparemment les machines requises pour
effectuer le travail et il souhaitait même avoir le marché des fameuses
barrettes.
Je ne désirais pas remonter
si tôt au village, la chaleur est encore importante et mon urticaire (allergie
à la chaleur combinée à la sueur) prend tout de suite des proportions gigantesques.
Mais les problèmes à régler étaient là, avec le menuisier d’abord, avec le
soudeur ensuite et il fallait payer les artisans qui avaient commencé à
travailler.
Moussa et son merveilleux sourire dans son activité préférée : faire le thé pour tous |
En arrivant vers 16 h
30 à Djibasso, c’est Moussa qui est venu me chercher en moto. Je vais saluer la
cour de Sally et j’appelle Robert, le représentant ici de l’association « Les
Enfants de Djibasso ». Nous allons directement chez le menuisier.
Au centre, Robert de l'association "Les Enfants de Djibasso" pendant les journées de formation |
Confirmation est donnée
que les deux menuisiers de Pia ont déclaré forfaits, ils ne sont pas suffisamment
équipés pour faire 40 ruches, l’épaisseur des planches est importante, ils
auront passé près de 4 jours pour sortir chacun une ruche qu’en plus ils
n’auront pas montée. Je demande pardon aux amis bricoleurs, menuisiers ou
ébénistes et à mon papa, mais vraiment je n’y connais rien en menuiserie et si
les villageois eux-mêmes croyaient que leurs menuisiers pouvaient le faire, je
ne vois pas pourquoi moi j’en aurais douté…
Vraiment, bravo à
Dramane, le Président, et à son bras droit Moussa, d’avoir eu l’initiative de
chercher, de s’être investis dans la négociation, car ce nouveau menuisier
demandait 5 000 FCfa par ruche. Ils ont bataillé pour qu’il accepte 3 000,
prix négocié au départ avec les menuisiers de Pia. Ils auraient pu se dire
qu’après tout ce n’était pas leur argent. Je n’ai pas manqué de les féliciter,
car c’est exactement ce que je souhaitais, qu’ils deviennent plus autonomes et
prennent l’opération en main, même si pour l’instant c’est encore moi qui
détiens « les cordons de la bourse » (expression pas véritablement
africaine, je vous le concède volontiers, je vais chercher son équivalent).
Dramane Songa, le président de l'association locale "Djigui Sémè Pia1" |
Là, plusieurs problèmes
se sont présentés à moi :
- Impossible
de compter les planches !...
Le
menuisier ne savait pas combien de planches il avait reçues. Il avait beau
compter et recompter avec Moussa, ils n’arrivaient pas à se mettre d’accord.
Ils parlaient de morceaux, effectivement il avait reçu des morceaux de ruches
découpés, des morceaux de planches aussi.
A
Pia, il en restait 11, Dramane joint au
téléphone nous l’a confirmé. Mais il n’a pas dit qu’il y avait encore des
morceaux (je les ai vus plus tard). Au final, il en manquait toujours 5 planches, ce qui
n’est pas rien.
Après
bien des questionnements, le menuisier s’est engagé à sortir les 40 ruches dans
ce qu’il avait de bois. Nous avons vu ensemble qu’il pouvait faire des
demi-fonds de ruches (l’autre demi étant remplacée par du grillage pour laisser
tomber les parasites varroa), et que vue l’épaisseur des planches, il pouvait
aussi les dédoubler pour faire deux petits côtés de la ruche par exemple. Bon
ce point étant réglé, nous nous mettons d’accord sur un acompte de la moitié,
le solde étant versé à la livraison prévue fin juillet. Somme totale prévue :
40 ruches à 3 000 FCFA, plus une à monter, 41 X 3 000, soit 123 000
FCFA.
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Le
menuisier affirme être en capacité de faire les barrettes
Je
vous rappelle que cette opération est beaucoup plus technique et nécessite du
matériel de précision. Les barrettes doivent avoir 3,2 cm d’épaisseur et une
forme bien particulière, de plus elles doivent être fendues dans la longueur de
façon à recevoir des bandelettes de cire qui amorcent le travail des abeilles
et surtout donnent une direction aux pains de cire qui seront bien verticaux et
parallèles.
Nous
lui demandons donc un échantillon pour le lendemain, jeudi, jour de marché. Si
l’échantillon est conforme, les barrettes pourront être faites également à
Djibasso. Les accords de paiement sont les mêmes que précédemment. Nous avons
même obtenu un prix par barrette inférieur à tout ce que j’ai pu trouver à
Bobo-Dioulasso, le prix minimum trouvé était de 225 FCFA la barrette, le
menuisier nous les fait pour 200. Il en faut un millier, somme totale prévue
200 000 FCFA (environ 300 euros)
Le
lendemain, jeudi, après quelques ajustements, nous validons les barrettes
prototypes réalisées.
Pour ceux qui suivent et s'intéressent au plan "finances", je n'avais pas prévu le bois des barrettes que le menuisier va devoir faire venir de Bobo (pas de bois samba à Djibasso) ; je comptais les faire faire à Bobo Dioulasso justement. Le bois des ruches a été payé et livré, les 3 000 FCFA correspondent uniquement à la main d'oeuvre.
Pour ceux qui suivent et s'intéressent au plan "finances", je n'avais pas prévu le bois des barrettes que le menuisier va devoir faire venir de Bobo (pas de bois samba à Djibasso) ; je comptais les faire faire à Bobo Dioulasso justement. Le bois des ruches a été payé et livré, les 3 000 FCFA correspondent uniquement à la main d'oeuvre.
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Certaines
ruches déjà découpées n’ont pas la longueur requise.
Sur
mon plan, il faut une longueur intérieure de 82,5 cm et je mesure à peine 78 cm
pour celles qui sont déjà découpées. Pourtant le menuisier a mesuré la ruche
que j’ai fait acheminer. Où est le problème ??? Je calcule mentalement 24
barrettes à 3,2 cm d’épaisseur, cela donne 76 cm. Elles doivent former un
plafond uniforme et serré en haut de la ruche, mais il faut laisser un jeu en
cas de fortes pluies et donc d’humidité, le bois va gonfler. Si on ne veut pas
que les barrettes se chevauchent et détruisent l’uniformité de ce plafond,
y-a-t-il vraiment besoin de 6,5 cm de jeu, cela me paraît beaucoup trop.
Pourtant l’expert de Bobo a bien insisté sur cette dimension.
J’essaie de le joindre, impossible à cet instant ! Je promets de rappeler dès que j’ai l’information attendue.
Le plafond de la ruche kenyanne constitué de 24 barrettes |
Pourtant l’expert de Bobo a bien insisté sur cette dimension.
J’essaie de le joindre, impossible à cet instant ! Je promets de rappeler dès que j’ai l’information attendue.
Bon, vous pouvez voir que je n'ai pas chômé dès le premier soir ! Une bonne bière fraîche plus un en-cas avant de repartir sur Pia. Nous avons une petite heure de pistes en moto.
Le ciel se couvre, les nuages noirs et lourds semblent se diriger sur nous, il est grand temps de partir.
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